hairy mary 2016 cuivre et acier 55x90x60cm (photo JLMaby)
I won t 2016 acier et fil de cuivre 80x42x53cm (photo JLMaby)
I won t 2016 acier et fil de cuivre 80x42x53cm (photo JLMaby)
Golnâz 2016 acier et fil de cuivre 80x43x53cm (photo JLMaby)
les anglaises 2016 acier et fil de cuivre 80x43x53cm (photo JLMaby)
vue de l'exposition galerie AL/MA, Montpellier 2016
I can 2017 acier, fil de cuivre 87x 82x 128cm
Notes pour un portrait, Geneviève Breerette, septembre 2016
Vanessa Notley travaille ses formes à partir de textes, de mots, de leur définition. Depuis longtemps, avec cette faculté d’écoute des sons qu’ont les habitants des langues étrangères. Depuis deux ans, le mot vestibule et sa capacité d’accueil d’images et d’idées plastiques génèrent ses dessins, ses sculptures, ses dessins de sculpture et ses sculptures à dessein.
Les choses dessinées ressemblent à des instruments de musique ou à des cornets acoustiques. Les sculptures sont des objets plus bizarrement faits, difficiles à identifier, hybrides, à perspectives variables. Selon l’angle d’approche, elles ont un air d’entonnoir, de coquille, de trompette ou de prothèse auditive. Il y en a quatre, comme les filles du Docteur March. La même forme presque simple, découpée dans une feuille d’acier noir pliée en cône et soudée, sert de base. Des fils de cuivre brillant plus ou moins longs, raides ou frisés, sont plantés dedans, en touffes, ou soigneusement alignés. Ils provoquent une cascade d’images allant du paillasson aux anglaises d’une fillette d’un autre temps, de la crinière au ressort à boudin. Ces attributs qui singularisent les figures du quatuor et ne font pas très sérieux, en rajoutent quant au brouillage des pistes.
Les dits Vestibules n’ont donc pas la forme d’un hall de maison. Ils relèvent plutôt de ce que désigne le mot vestibule en anatomie : des espaces corporels, internes, et intimes, liés à la perception auditive (- de l’oreille interne), à l’ingestion de nourritures (- de la bouche), et au sexe féminin (- vaginal). À l’ouïe, au goût, au toucher. Dans tous les cas de figure, en architecture comme en anatomie, le mot vestibule désigne un espace intermédiaire avec une entrée assurée et, en principe, une ouverture sur un autre espace, un débouché.
« Entre-lieu » dit l’artiste à propos de sa nouvelle fabrique d’images qu’elle s’emploie à remplir de sens, en inscrivant ses jeux croisés de formes et de métaphores dans l’exploration et l’exploitation d’une forme creuse pleine de potentiel. À remplir, en y mettant tout ce qu’il faut pour provoquer une perception active de l’objet, qui sera haptique à la Deleuze, et compliquée à souhait par l’implication virtuelle d’un troisième sens, l’ouïe s’ajoutant à la conjonction de l’oeil et de la main.
En dépit de leurs drôles d’attributs, ces constructions physiques et mentales ne manquent pas de sérieux, ni de tenue, fondées qu’elles sont sur de solides savoirs. On pourrait leur trouver une parenté avec les « objets à fonctionnement symbolique » des Surréalistes. Paradoxalement, cela n’empêcherait pas une lecture formaliste, en termes de détournement, de dérive, de perversion : détournement de matériaux industriels, dérive de structures primaires, perversion de l’art minimal. Ni de les mettre au compte d’une réactualisation de la bonne vieille question du sculpteur : celle de la sculpture, évidemment, de sa nature, de son extension et de sa fonction dans l’espace. Question que l’artiste traiterait en quatre temps, dans quatre histoires de formes, en relation avec une béance contenue, cernée, dessinée à dessein, avec ses dessous et ses dessus, ses dehors et son dedans.
De cette ouverture de la sculpture aux vents de l’esprit et des formes, il ressortirait une sorte d’autoportrait à rebrousse-poil, qui permettrait de situer l’artiste et son « entre-lieu » à la jonction de l’objet sculpture et du sujet créateur, et de préciser le rapport au monde de l’individu-artiste. La pièce où l’inscription I WONT, « Je ne pas », est écrite au point de cuivre dans l’acier troué pour faire passer les fils, est significative de ce jeu du je dans lequel par delà les mots, ce sont des attitudes - de femme – qui prennent forme.
(1) Note de notes pour un portrait Depuis septembre dernier, Vanessa Notley a réalisé 10 nouvelles sculptures à partir de la même idée d’"entre-lieu », de la même forme matricielle, travaillant dans l’inconfort et le comble d’une béance, jusqu’à l’usure du thème. Jusqu’au repli amusé. La boucle est bouclée. G.B.